Politique
Un travailleur a droit à des prestations relativement au stress chronique qui est survenu du fait et au cours de son emploi.
Un travailleur n’a droit à aucune prestation relativement au stress chronique causé par des décisions ou des mesures que prend son employeur concernant son emploi, y compris une décision de modifier le travail à accomplir ou les conditions de travail, de prendre des mesures disciplinaires à l’égard du travailleur ou de le licencier.
REMARQUE
D’autres directives s’appliquent aux premiers intervenants et aux autres travailleurs désignés qui demandent l’admissibilité pour un état de stress post-traumatique (voir le document 15-03-13, État de stress post-traumatique chez les premiers intervenants et autres travailleurs désignés).
But
La présente politique a pour but de fournir des directives sur l’admissibilité concernant les demandes de prestations pour stress chronique.
Directives
Définition
Harcèlement en milieu de travail
Le harcèlement en milieu de travail se produit lorsqu’une ou des personnes, au cours de l’emploi, adoptent une ligne de conduite caractérisée par des remarques ou des gestes vexatoires contre un travailleur, y compris l’intimidation, lorsqu’elles savent ou devraient raisonnablement savoir que ce comportement est importun.
Stress chronique
Une demande de prestations pour stress chronique (telle que décrite ci-dessous) est distincte d’une demande pour stress traumatique. Pour des renseignements au sujet des demandes de prestations pour stress traumatique, voir le document 15-03-02, Stress traumatique.
Un travailleur a généralement droit à des prestations pour stress chronique si une lésion attribuable au stress adéquatement diagnostiquée est causée par un facteur de stress important relié au travail qui est survenu du fait et au cours de son emploi. Pour plus de précisions, voir le document 15-02-02, Accident survenu au cours de l’emploi.
REMARQUE
Le terme « facteur de stress relié au travail » désigne tant divers facteurs de stress reliés au travail qu’une série cumulative de facteurs de stress reliés au travail.
Pour considérer l’admissibilité relativement au stress chronique, le décideur doit être en mesure de déterminer l’événement ou les événements qui auraient provoqué le stress chronique. Cela signifie que le décideur, après avoir évalué et soupesé toutes les preuves pertinentes et disponibles, y compris celles fournies par le travailleur, ses collègues, le personnel de supervision ou d’autres personnes, est convaincu qu’il est plus probable qu’improbable que l’événement ou les événements aient eu lieu.
Pour plus de clarté, il n’est pas nécessaire que le compte rendu du travailleur soit corroboré par d’autres témoins pour être accepté. Les témoignages qui corroborent ou réfutent le compte rendu du travailleur peuvent être pertinents. L’absence de témoignages corroborant le compte rendu du travailleur n’entraîne pas automatiquement le refus de l’admissibilité. L’absence d’une telle preuve peut toutefois être un facteur pertinent à prendre en considération, en particulier dans les cas où l’on s’attendrait raisonnablement à ce qu’une telle preuve soit apportée compte tenu des circonstances. En l’absence de preuves corroborantes fournies par des témoins, le décideur doit évaluer et soupeser tous les autres éléments de preuve pertinents et disponibles, y compris le compte rendu du travailleur ainsi que toute preuve soumise par le travailleur, afin de déterminer la probabilité que l’événement ou les événements se soient produits tels qu’ils ont été décrits.
Facteur de stress important relié au travail
Un facteur de stress relié au travail est généralement considéré comme important s’il est d’une intensité et(ou) d’une durée excessives par rapport aux pressions et aux tensions normales que subissent les travailleurs dans des circonstances semblables.
Le harcèlement en milieu de travail est généralement considéré comme un facteur de stress important relié au travail.
Emplois caractérisés par un degré élevé de stress courant
Une demande de prestations pour stress chronique présentée par un travailleur qui occupe un emploi dans une profession ou une catégorie d’emplois au sein d’une profession raisonnablement caractérisée par un degré élevé de stress courant ne devrait pas être refusée simplement parce que tous les travailleurs qui occupent un emploi dans cette profession ou catégorie d’emplois au sein de cette profession sont normalement exposés à un niveau élevé de stress. Par conséquent, dans certains cas, une exposition constante à un niveau élevé de stress courant au fil du temps peut être considérée comme un facteur de stress important relié au travail.
Les emplois à degré élevé de stress courant présentent habituellement les caractéristiques suivantes, ou l’une de celles-ci :
- responsabilité en ce qui concerne des questions de vie ou de mort; ou
- travail courant dans des circonstances extrêmement dangereuses.
Conflits interpersonnels
Les conflits interpersonnels entre les travailleurs et leurs superviseurs, leurs collègues ou les clients sont généralement considérés comme une caractéristique typique de tout emploi normal. Par conséquent, de tels conflits interpersonnels ne sont pas généralement considérés comme un facteur de stress important relié au travail, à moins que le conflit
- équivaille à du harcèlement en milieu de travail, ou
- engendre une conduite qu’une personne raisonnable percevrait comme inacceptable ou abusive.
Norme de preuve et de causalité
Dans tous les cas, le décideur doit être convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le facteur de stress important relié au travail
- est survenu du fait et au cours de l’emploi, et
- est la cause prédominante d’une lésion attribuable au stress adéquatement diagnostiquée.
Aux fins de la présente politique, « cause prédominante » s’entend du facteur de stress important relié au travail qui est la cause première ou principale de la lésion attribuable au stress, comparativement à tous les autres facteurs pris individuellement. Par conséquent, le facteur de stress important relié au travail est toujours considéré comme la cause prédominante de la lésion attribuable au stress même si son effet pourrait être surpassé par l’effet combiné de tous les autres facteurs.
Exigences diagnostiques
Avant qu’une demande de prestations pour stress chronique puisse être traitée, il est nécessaire qu’un diagnostic conforme au Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) soit posé, diagnostic qui peut inclure, sans toutefois s’y limiter :
- un trouble de stress aigu;
- un état de stress post-traumatique;
- un trouble de l’adaptation; ou
- un trouble anxieux ou dépressif.
Dans la plupart des cas, la Commission accepte de traiter la demande de prestations si un membre approprié d’une profession de la santé réglementée établit un diagnostic fondé sur le DSM. Cependant, dans les cas complexes, par exemple s’il existe des preuves qu’un ou des facteurs de stress non reliés au travail pourraient avoir causé la lésion ou y avoir contribué, le décideur peut demander une autre évaluation, y compris une évaluation par un psychiatre ou un psychologue, afin d’aider à clarifier l’admissibilité initiale ou continue.
Conformément à la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées, les membres d’une profession de la santé dûment réglementée qualifiés pour poser un diagnostic fondé sur le DSM sont
- les médecins,
- les infirmières praticiennes,
- les psychologues, et
- les psychiatres.
Trouble psychique préexistant non relié au travail
Pour plus de précisions sur l’effet (le cas échéant) d’un trouble psychique préexistant non relié au travail sur une demande de prestations pour stress chronique, voir le document 15 02-03, Troubles préexistants.
REMARQUE
Lors de l’évaluation de l’effet (le cas échéant) d’un trouble préexistant dans le cadre d’une demande de prestations pour stress chronique, les directives de la politique 15-02-03, Troubles préexistants, s’appliquent, sauf pour déterminer si un trouble psychique préexistant l’emporte sur la lésion attribuable au stress reliée au travail. Dans ce cas, le décideur utilise le test de cause prédominante plutôt que le test de détermination du facteur contributif important. De cette façon, le décideur veille à ce que le test de causalité utilisé pour déterminer l’admissibilité initiale dans le cadre de la demande soit compatible avec le test utilisé pour déterminer l’admissibilité continue.
Décisions ou mesures reliées à l’emploi prises par les employeurs
Le travailleur n’a pas droit à des prestations relativement au stress chronique attribuable aux décisions ou aux mesures prises par l’employeur dans le cadre de l’exécution de la fonction « emploi ». Ces décisions ou mesures peuvent concerner ce qui suit :
- les licenciements;
- les rétrogradations;
- les mutations;
- les mesures disciplinaires;
- la modification de l’horaire de travail; ou
- les changements d’attentes en matière de productivité.
Par contre, le travailleur peut avoir droit à des prestations pour stress chronique attribuable aux décisions ou aux mesures prises par l’employeur qui ne s’inscrivent pas dans l’exécution de la fonction « emploi », notamment
- le harcèlement en milieu de travail, ou
- une conduite qu’une personne raisonnable percevrait comme inacceptable ou abusive.
Entrée en vigueur
La présente politique s’applique à toutes les décisions rendues le 1er mars 2024 ou après cette date, pour tous les accidents survenus le 1er janvier 2018 ou après cette date. Elle s’applique également aux demandes de prestations indiquées à la rubrique « Dispositions transitoires » ci-dessous.
Dispositions transitoires
Nouvelles demandes de prestations (accidents survenus le 29 avril 2014 ou après cette date)
Si un travailleur est atteint d’un stress chronique survenu le 29 avril 2014 ou après cette date, mais qu’il n’a pas déposé une demande de prestations pour ce stress chronique auprès de la Commission avant le 1er janvier 2018, le travailleur ou le survivant du travailleur peut déposer une demande pour stress chronique auprès de la Commission, tant que la demande est présentée le 1er juillet 2018 ou avant cette date.
Demandes en instance (au 1er janvier 2018)
Dans la présente politique, on entend par « demandes en instance » les demandes de prestations pour stress chronique déposées auprès de la Commission ou du Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (TASPAAT) sur lesquelles ceux-ci n’ont pas statué au 1er janvier 2018. Pour clarifier davantage, il s’agit de demandes de prestations au sujet desquelles, au 1er janvier 2018, les conditions suivantes sont satisfaites :
- une demande de prestations pour stress chronique a été déposée, mais la Commission n’a pas encore statué sur celle-ci;
- il existe un droit de déposer un avis de contestation à l’égard de la demande pour stress chronique après que la décision sur l’admissibilité initiale a été rendue, et l’avis de contestation est déposé ou a été déposé dans le délai approprié;
- il existe un droit de déposer un avis d’appel auprès du TASPAAT à l’égard de la demande pour stress chronique après que la décision finale de la Commission a été rendue, et l’avis d’appel est déposé ou a été déposé dans le délai approprié; ou
- le travailleur a déposé un avis d’appel auprès du TASPAAT, et la demande pour stress chronique est en instance auprès du TASPAAT.
La Commission applique la présente politique et rend une décision pour toutes les demandes de prestations pour stress chronique en instance, peu importe quand le stress chronique du travailleur est survenu.
Historique du document
Le présent document remplace le document 15-03-14 daté du 2 janvier 2018.
Références
Dispositions législatives
Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail, telle qu’elle a été modifiée.
Articles 13, 13.1 et 159
Paragraphe 2 (1)
Procès-verbal
de la Commission
No 2, le 26 février 2024, page 628